Sud-Kivu/Élections : À Kabare, des femmes déterminées à voter pour des femmes candidates

Par Bernardin MURHABAZI/JDH

Rédaction Centrale
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Les femmes et filles de Kabare veulent améliorer leur présence dans la gestion de la chose publique. Cela, à travers leurs participations massives aux élections prochaines en RDC. Conscient des défis qui les ont longtemps empêchées de s’intéresser à la politique, cette année elles voient les choses autrement et veulent améliorer leur participation en politique.

Lors des précédentes élections, particulièrement celles de 2018, sur 32 députés élus au Sud-Kivu à la députation Nationale, 4 sièges étaient enregistrés dans la circonscription électorale de Kabare, parmi lesquels il n’y avait pas de femme. Même situation à l’hémicycle provincial, où sur les 6 députés élus à Kabare, il n’y avait pas de femme.

La genèse de la sous représentativité des femmes de Kabare.

A Kabare, la  marginalisation des femmes et filles dans la sphère politique reste une réalité comme dans plusieurs provinces de la RD Congo

« La politique, c’est pour les hommes ! » disent certains homologues candidats dans les partis politiques, renseigne Madame Cordule Feza, directrice de discipline dans une école de la place et candidate aux élections provinciales.

A elle de poursuivre, cette situation de marginalisation fait que ; « Certaines femmes pensent qu’elles sont prédestinées à s’occuper du foyer et de l’éducation des enfants en estimant que  les deux sont difficilement conciliables. En tant que directrice de discipline dans une école secondaire,
j’encadre les filles et j’ai remarqué qu’elles refusent de parler et de se défendre », à elle de révéler que ; « C’est une des principales raisons qui m’ont poussée à me présenter candidate».

Pour d’autres femmes, c’est le manque de moyen qui pose problème.

Madame Safi Bashizi, candidate à la députation provinciale estime que ; « Le manque de moyen financier figure comme la principale raison car, à part la campagne, le dépôt de la candidature est assuré grâce au paiement d’une caution. Or, la majorité des femmes n’ont pas les moyens».

Mme Françoise Chishungu femme leader du groupement de Cirunga et candidate à la députation nationale, soutient aussi que le moyen est le nœud du problème en ajoutant aussi le problème culturel pour sa part ; « La difficulté à laquelle nous femmes candidates sommes confrontées, est la culture. Nous sommes confrontés à la réticence de la population parce qu’on est femme. Lorsqu’il faut mener la campagne électorale, on doit faire un effort pour convaincre par la parole et les intentions les potentiels sympathisants, voire même les autres femmes. C’est ce qui diffère de la campagne menée traditionnellement par des hommes qui consistent notamment, à offrir des cadeaux », s’indigne-t-elle.

Les femmes déterminées à s’organiser !

Pour remédier à tous ces problèmes, plusieurs organisations luttent pour promouvoir et faciliter l’accès des femmes aux processus électoraux. C’est le cas de l’Association des Femmes de Médias (AFEM) qui s’active dans le renforcement des capacités des futures candidates de en leur offrant des formations de tous types: leadership, communication, comment mener une campagne électorale, etc.

« Nous éveillons les partis et regroupements politiques pour que leurs listes électorales soient adaptées à la parité », a recommandé Julienne Baseke, coordinateur de AFEM.

Elle estime que les femmes ne doivent pas seulement servir de marchepieds pour les autres. AFEM mène également des actions dans les différents coins de Kabare pour sensibiliser la population à la question de la participation des femmes aux processus électoraux. Enfin, un partenariat avec les médias est établi pour sensibiliser l’opinion publique sur la question, rassure Julienne Baseke ; « Les candidates femmes sont celles qui mobilisent, qui sont dans l’économie, qui sont présentes dans différentes activités. Les femmes ne sont pas dans des partis politiques pour seulement la visibilité. Elles sont là comme citoyennes ayant des droits civiques. Elles sont capables de faire ce qu’on attend d’elle ».

Toutes les batteries en marche pour une participation significative des femmes aux élections ?

« Il y a des femmes députées à Kabare, mais elles ne s’affirment pas », a déclaré Dorothée Masirika, présidente de la ligue des femmes AFDC au Sud-Kivu. Elle rassure son implication active pour un alignement équitable au sein de sa famille politique.

« Nous sommes persuadées que la question de l’inclusion particulièrement de la femme est une question de droits de l’homme, de démocratie. Si nous ne le faisons pas, nous aurons violé un droit fondamental de l’homme et nous aurons violé une notion essentielle de la démocratie. Nous allons travailler ensemble au sein du parti pour arriver à identifier les problèmes qui empêchent, non seulement la participation mais aussi la représentation. Nous ne voulons pas nous limiter à la participation, c’est-à-dire voter pour d’autres personnes, nous voulons aussi voir la représentation de la femme refléter sa taille, son poids démographique », a-t-elle dit

Pour sa part, Jean Marie Kajemba, chef d’antenne de la CENI/Kabare, affirme que l’enrôlement a prouvé que les femmes de Kabare sont debout et s’engagent à travailler avec les hommes pour relever le plus grand défi, celui de rendre prospère la RDC. Il souhaite voir les femmes majoritaires lors des prochains scrutins et au sein des institutions congolaises, notamment le parlement pour que la femme puisse mettre en exergue son expertise.

« Nous sommes préoccupées par la représentation des femmes sur les listes des partis et regroupements politiques. Nous demandons aux partis d’aligner significativement les femmes sur leurs listes des candidats étant donné qu’ils ont à leur disposition des innovations contenues dans la nouvelle loi électorale de juin 2022, à savoir l’article 13 qui exempte du paiement de la caution les partis qui vont respecter la parité sur leurs listes », a déclaré le chef d’antenne de la CENI/Kabare.

Et d’ajouter: « la répartition des sièges est une question purement technique. Il s’agit des enrôlés selon les territoires et provinces. A chaque cycle électoral, le même paysage se dessine en RDC, avec les mêmes réactions. Nous demandons aux acteurs et actrices politiques de se surpasser pour privilégier l’intérêt général », a-t-il dit.

Quelles dispositions légales par rapport à l’alignement des femmes au sein de partis politiques ?

Maître Innocent Nyakuvra, l’un des animateurs juristes au sein de SOS Information Juridique Multisectorielle de Cirunga à Kabare. Il précise que depuis son accession à l’indépendance, la RDC fournit des efforts pour offrir des opportunités légales aux hommes et aux femmes en vue de leur protection et sécurité. « A part la Loi du 1er août 2015 portant modalités d’application des droits de la femme et de la parité, la liste qui aligne 50% au minimum de femmes dans une circonscription est exemptée du paiement de la caution », telle est la modification apportée à la nouvelle loi électorale, renseigne-t-il.

A lire : Sud-Kivu: La loi électorale, une opportunité pour une meilleure participation politique des femmes à Kabare 

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